16 juillet 2017, Commentaires: 0

La semaine dernière, le Wall Street Journal annonçait que Facebook s'apprêterait à lancer le mois prochain un service emploi. Autrement dit, le réseau social n°1 dans le monde s'apprêterait à concurrencer les réseaux réservés aux professionnels tels que LinkedIn ou Viadeo. La réaction d'Olivier Fécherolle, directeur général de Viadeo.

Selon le Wall Street Journal, Facebook pourrait prochainement lancer un service emploi au coeur de son réseau social. Qu'est ce que cela vous inspire?

Il faut déjà préciser qu'il ne s'agit que de rumeurs. L'article a d'ailleurs été critiqué, car basé sur des "si", en citant des sources "proches du dossier". Il y a donc un gros point d'interrogation sur cet éventuel lancement. On part de rumeurs écrites dans un article et on en arrive à un emballement assez rapide. Comme si tout le monde espérait que Facebook se lance dans le marché de l'emploi. Même s'il faut bien sûr s'intéresser à ce projet supposé.

Sur le projet en lui-même justement, qu'en pensez-vous?

Il y a déjà des applis dédiées qui tournent bien. On parle d'une boîte innovante, un acteur incontournable du web. Mais il devra fournir de gros efforts s'il entend proposer un service "emploi" susceptible d'être efficace. Les différences avec les réseaux pros sont nombreuses. Il est actuellement loin de pouvoir séparer les domaines professionnels et personnels. Je ne reviens pas sur les nombreux faits divers liés à Facebook, les affaires de licenciements, de diffamation. J'ai une conviction: on ne peut pas mélanger les réseaux pros et persos. C'est déjà un vrai obstacle s'ils décident de se lancer. Ces affaires ont causé des torts à l'image de marque de Facebook.

Vous semblez sceptique…

Il y a des défauts majeurs que Facebook devra à tout prix corriger. Aujourd'hui, la recherche de personnes ne peut se faire que par prénoms, il n'y a aucun critère de compétences. Ils sont loin de pouvoir faire interagir efficacement recruteurs et demandeurs d'emploi. Facebook a révolutionné la façon dont on communique avec sa famille, ses amis. Mais il y a un travail d'adaptation nécessaire à l'emploi. De façon imagée, c'est comme si le réseau social avait inventé un langage qu'il faudrait aujourd'hui traduire. Est-ce qu'il va réussir à gérer sur les deux tableaux sans affaiblir son business ? La problématique est là. On va regarder ça de près, parce qu'il faut s'intéresser à ce que fait une entreprise comme Facebook. Mais lancer un service finalisé, complet et efficace dans l'immédiat, je ne vois pas comment ils pourraient faire. Il y a beaucoup de travail.

Facebook a aussi des arguments en sa faveur, un potentiel de plus de 900 millions d'utilisateurs.

C'est vrai. Je prendrai surtout en exemple les pages des entreprises. Elles sont aujourd'hui trop inexploitées. Le nombre d'entre elles comportant une section RH est largement minoritaire. Mais même si le phénomène tendait à se développer, il ne serait pas suffisant. Parce que le service reposerait uniquement sur les candidatures spontanées, qui ne représentent qu'une petite partie du marché de l'emploi. Il faut faciliter, voire créer le rapprochement entre l'offre et la demande. Parce que l'offreur ne peut pas connaître ses candidats potentiels et qu'il serait trop restrictif de laisser les candidats démarcher les entreprises qu'ils connaissent. Sans quoi le service délaisserait toutes les entreprises locales, ou de petite taille. Pour résumer, on peut dire que Facebook, s'il procède à des ajustements, pourrait rapidement être efficace sur le segment des candidatures spontanées. Pour le reste, cela va nécessiter de profondes modifications.

Quelle est la force des réseaux professionnels tels que le vôtre ?

Nous accumulons les informations sur les compétences, le profil de nos membres. Elles permettent aux entreprises d'aller chercher des gens susceptibles de les intéresser. Le marché de l'emploi, ce n'est pas seulement les chômeurs. C'est aussi la mobilité, changer d'entreprise. Grosso modo, ça peut représenter une masse de 20% de la population, qui va être dans une démarche plus ou moins active. Vous me direz que 20% de 900 millions de membres, ça donne un chiffre intéressant. Mais le volume ne fait pas tout. Ce qui compte encore une fois, c'est la bonne adéquation entre l'offre et la demande.

Allez-vous anticiper cette éventuelle arrivée sur votre secteur ?

On va suivre avec attention ce qu'aura à proposer, ou non, Facebook. Il lui faudra dans tous les cas gagner en clarté. On ne sait parfois plus ce qui est public, privé, ce qui était privé et est devenu public. Mais le projet a du sens, on ne peut pas nier que le potentiel soit là. Il y a peut être des connexions à développer avec le type de services que nous proposons. Pour moi, il s'agit de cercles différents, qui méritent de se rapprocher. Nous avons tous des collègues avec lesquels nous sommes amis. Les connexions existent. Il y a peut être des choses à envisager.

 

Source http://lexpansion.lexpress.fr

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